Choisir son camp ?

Je vois passer régulièrement des injonctions à « choisir son camp », disant que le silence est complice du crime.

Alors voici mon avis, pour ce qu’il importe, c’est-à-dire assez peu, face au monde qui va.

Mon soutien va aux peuples, aux petits, aux opprimés, aux victimes, ceux qui subissent, alors qu’ils n’ont rien demandé que de vivre en paix dans leurs maisons, de subvenir à leurs besoins et de prendre soin de leurs enfants. Et ceci est valable quelle que soit leur origine, leur langue, leur religion.

Les responsables de la situation, ce sont les politiques, les religieux et les financiers, tous ceux qui ont intérêt à ces affrontements, car ils y trouvent matière à conserver leur pouvoir, accroître leurs biens et dominer les peuples, d’une manière ou d’une autre.

Je ne rentrerais pas dans le détail de l’œuf ou de la poule, de qui commet le plus d’atrocités, toute violence est atroce , inutile et condamnable, même celle qu’on tente de justifier en légitime défense. Je pense aux victimes.

La question que je me pose est la raison de ces guerres continuelles, l’actuelle n’étant que le prolongement d’une guerre qui dure depuis plusieurs siècles. Est-ce la possession d’une terre ? La terre n’appartient à personne, nous n’y sommes que de passage pour une durée très limitée. « Terre de nos ancêtres » ? Quelle est la durée « légale » pour que ce terme ait un sens ? 1 000 ans, 3 000, 100 000 ? Selon la perspective où l’on se place, je pourrais aussi revendiquer cette terre, car mes ancêtres (nos ancêtres communs, devrais-je dire) y sont passés, venant d’Afrique de l’Est, avant de venir s’installer en Europe.

Mon idée est que chacun doit avoir le droit à sa maison, son lopin de terre, en paix avec ses voisins, qu’ils soient ou non de la même « race » (nous sommes tous de la race humaine, il me semble) ou d’une religion différente.

Voilà : la religion. Le fond du problème est là, à mon avis. Je ne comprends pas qu’on se batte au nom d’un dieu, qui pourtant est le même pour tous dans ce conflit. Dieu d’Israël, le dieu d’Abraham, patriarche de cette religion, mais le dieu d’Abraham n’est-il pas aussi celui des chrétiens ? Et Ibrahim, Khalil Allah, que vénèrent les musulmans, n’est-il pas le même Abraham ? Dans la mythologie, il y a le messager, la main gauche de Dieu : l’archange Gabriel. Il apparaît à Daniel. Puis c’est lui qui annonce à Marie la venue de son fils. Enfin, sous le nom de Djibril, il apparaît également au prophète Mahomet, et certaines interprétations disent même qu’il lui porte la parole de Dieu.

Ces trois branches vénèrent donc le même Dieu, unique (d’ailleurs, s’il est unique, ce doit donc logiquement être le même pour tous…) Que les formes de le vénérer changent, ainsi que les textes, les rites et les lieux, en fonction des origines, de la culture et de l’époque, c’est normal. De là à se battre en son nom, alors qu’il est le même, excusez-moi, mais je saisis mal la raison.

J’imagine trois représentants de ces religions, se présentant devant Dieu, les mains couvertes de sang, fiers d’avoir combattu les infidèles au nom de leur dieu.

Il leur demande : qu’avez-vous fait, vous, sur cette terre que je vous avais confiée, durant votre court passage, en vous demandant de la faire fructifier, et d’en partager le fruit avec les pauvres, avec l’étranger de passage, avec la veuve et l’orphelin ? Avez-vous suivi mes commandements : Aime ton prochain, ne tue pas. Pourquoi vous présentez-vous ainsi, les mains couvertes de sang ? Chaque blessure que vous avez infligée, c’est à moi que vous l’infligiez.

Voilà ce que j’imagine, et ce que chacun devrait envisager.

J’en reviens à mon propos de départ : à qui profitent ces crimes ? Aux politiques, incapables de s’entendre (ou faisant tout pour ne pas y arriver, car ils y trouvent leur intérêt), aux responsables religieux, avec leurs injonctions à la « guerre sainte », avec leurs rêves de terre promise, quel que soit leur bord, et aux financiers qui profitent de ces conflits pour s’enrichir plus et plus encore. Tous ces gens devraient rendre des comptes.

La terre est notre bien commun, apprenons à la partager justement, équitablement, et à respecter l’autre, même s’il croit différemment, s’il mange différemment, s’il parle différemment. Les différences nous enrichissent, les conflits n’engendrent que la souffrance et tout le monde est finalement perdant (sauf les quelques-uns dont je parlais plus haut).

Illustration : photo de Ricki Rosen

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