Monde étranger

Ce monde m’est de plus en plus étranger.

Course folle après la satisfaction de désirs futiles,

besoin inassouvi de posséder, encore et encore,

des choses inutiles, sitôt reçues, sitôt posées, sitôt oubliées,

qu’on abandonne, dans un coin isolé, à prendre la poussière.

Rechercher la richesse, soi-disant à force de mérite.

Quel mérite y a-t-il dans l’accumulation,

dans l’ostentation, et dans le gaspillage.

Quel mérite trouve-t-on à engranger

plus que le nécessaire et que le suffisant,

quand tout autour, ils sont nombreux à souffrir

de n’avoir pas l’indispensable pour survivre ?

Et ce n’est pas par manque de mérite,

que les gens souffrent, dans ces pays lointains.

Ce sont bien les plus riches qui sont venus,

qui ont pillé, qui ont tué, qui refusent de soigner,

de nourrir, qui refusent de partager

le trop plein des richesses qu’ils ont usurpées.

Au nom de quoi ? Du mérite qu’il y a à être les plus riches ?

Quel mérite ont ces gens à détruire la vie,

à salir ce monde qui est pourtant si beau,

ce monde qui m’est de plus en plus étranger,

mais ce n’est pas le monde, ce sont les gens qui l’ont rendu ainsi,

ce sont ces gens-là que je fuis.

Valéry Sauvage – juin 2021

Chaînes


Lourdes sont les chaînes que l’homme porte.
Souvent, il gémit et se plaint.
Il ne tient qu’à lui de les poser là
et de poursuivre son chemin, libre.
Nul verrou, nul cadenas, nul collier à son cou.
Si l’homme porte ces lourdes chaînes,
c’est parce qu’il le veut bien.
« C’est plus facile à dire qu’à faire » !
C’est la réponse que l’on me fait souvent.
Non ! le faire est à la portée de tous,
mais faut-il encore le vouloir.
Depuis notre première heure,
et jusqu’à la dernière,
nous prenons et rendons notre souffle.
C’est en étant conscients de ce geste banal,
que nous découvrirons que nous sommes libres,
que nous l’étions déjà, et depuis le début.
Ce n’est pas plus difficile que cela.
Ceux qui rétorquent que pour eux, c’est trop dur,
ont-ils vraiment fait l’effort de le faire ?
Personne ne peut boire à leur place.
Celui qui a vraiment soif, alors il va à la fontaine.
Si vos chaînes sont pesantes, que vous en êtes las,
posez-les, cela ne tient qu’à vous.
Respirez, ressentez au fond de vous
le flux qui anime le monde.
Alors, vous découvrirez, à l’intérieur,
ce qu’est vraiment la paix,
alors sur le côté, vous laisserez vos chaînes,
alors, légers et joyeux, vous marcherez sur le chemin.


Le dit d’Athanase, le sage de la montagne.
Valéry Sauvage – juin 2021