Les problèmes à l’envers


Souvent nous prenons les problèmes à l’envers.
J’entends dans la bouche de certains religieux
qu’il faut cultiver l’altruisme, la bienveillance,
car cela va nous mener à l’éveil.
D’autres préconisent d’acquérir avant tout des connaissances.
Or l’histoire nous a montré que ces vertus et ces savoirs
n’ont jamais rendu l’humain meilleur.
Ce qu’il faut chercher, c’est d’abord la source.
Une fois cette source trouvée, alors les vertus en découlent,
de manière naturelle, alors les savoirs trouvent leur utilité
et ne sont pas détournés vers de sombres desseins.
Aucune règle ne peut s’appliquer avec succès
si elle ne trouve pas son origine dans notre propre expérience.
On peut bien la lire dans un livre, l’entendre des lèvres d’un érudit,
qu’importe, si elle ne naît pas en nous,
si elle n’est pas issue de notre expérience même,
alors pendant un temps nous nous efforcerons de l’appliquer
puis l’effort deviendra peine, et le résultat sera vain.
Nous ne devons pas adopter un savoir venu d’ailleurs
mais comprendre les choses de l’intérieur.
Alors, nous saurons vraiment comment et pourquoi agir.
Alors nous n’aurons pas besoin de règles et de lois
cas en nous, nous aurons trouvé ce qui est nécessaire
pour nous guider sur notre chemin.
Cette source est notre âme, l’esprit n’en est que l’outil.
Hélas, il est rare que l’on nous enseigne la différence,
et seul l’esprit a droit de cité dans notre monde.
L’âme fut confisquée par certains religieux,
ou confondue avec l’esprit par certains philosophes.
L’esprit est ce qui pense en nous. Ce qui apprend et réfléchit.
Il nous est fort utile, mais n’est pas suffisant.
L’âme tire son nom de « Anima », ce qui anime.
C’est le souffle, ce qui donne la vie à l’animal que nous sommes.
Or, c’est dans ce souffle que se trouve la source.
L’attention que nous portons à notre propre souffle
ouvre en nous la porte vers l’éveil.
Éveil à ce que nous sommes, au sens de notre existence.
Si nous pratiquons la contemplation de ce souffle,
nous ressentons en nous diverses sensations :
calme tout d’abord, paix intérieure, qui devient joie,
joie d’avoir enfin trouvé sa place, sa vraie place dans ce monde,
et cette joie devient amour, non pas l’amour que l’on porte à un être,
mais un amour que l’on porte à toutes choses.
Et l’ensemble s’appelle le bonheur.
Et l’on découvre également que l’Anima que nous portons en nous,
nous la partageons avec toutes choses, c’est l’Anima Mundi.
Ce que partout nous avons recherché se trouve en nous caché.
Nourris à cette source, alors l’esprit, la pensée, le savoir
vont enfin prendre leur juste place, au service de cette âme,
et non juste au service de nos appétits personnels.
Cette source va alors amener la bienveillance et l’altruisme
qui en sont des conséquences naturelles.
Nous rêvons de changer le monde, mais nos efforts,
de tous temps, se sont révélés vains.
Nous avons encore pris les choses à l’envers.
Comment changer le monde si l’humain ne change pas.
Si l’humain change, alors le monde qu’il construit de ses actions
reflétera le changement qu’il vit en lui-même,
et pour l’être éveillé, le monde sera lumineux,
fait de ce calme, cette paix, cette joie et cet amour qu’il porte en lui.
Tant que l’humain n’obéit qu’à ses instincts : pouvoir, domination
satisfaction de ses désirs, accumulation de biens superflus,
alors le monde qu’il habite sera à son image.
Peut-on forcer les gens à renoncer à ces comportements ?
Les lois érigées dans ce but semblent bien impuissantes.
C’est dans le cœur de l’être qu’il faut chercher la clé.
Changeons notre vision du monde en contemplant notre âme,
puis, à la lumière de cette observation, construisons notre monde.
Personne ne pourra nous forcer à le faire.
Chacun doit faire sa part, avec sincérité et avec constance.
Vous ne pourrez pas le faire pour votre voisin
et lui, il ne le fera pas à votre place.
Alors, ne dites pas « c’est impossible »,
mais en faisant le premier pas vous-même,
rendez ce changement possible.
Si le monde ne devient pas meilleur du jour au lendemain,
au moins, pour vous déjà, il le sera un peu,
et l’élan ainsi donné servira d’exemple pour que d’autres le suivent.

Le dit d’Athanase – le sage de la montagne

Valéry Sauvage – août 2021

Paroles


Les mots ne veulent rien dire s’ils ne proviennent pas du bon endroit,
afin d’atteindre ensuite leur vraie destination.
La plupart des théories ne sont que des colosses aux pieds d’argile.
Que valent ces philosophies, érigées à grand renfort de concepts
quand les prémisses ne sont que de fumeuses hypothèses ?
Nous passons notre vie à tourner autour du pot,
à courir sans fin après des ombres, à rêver de chimères.
Pourtant le secret autour duquel tout tourne,
le but ultime, qui fait couler tant d’encre,
se résume en un souffle.
Tout le reste n’est issu que des mots de songe-creux,
prières de moulins, pensées grandiloquentes, billevesées.
Que de vies passées à chercher
dans les moindres recoins du monde, de la pensée,
à construire des théories complexes,
à donner à toutes choses de savantes explications,
sans que, jamais, cela n’apporte de solution,
ne révèle enfin le sens que l’on cherche à notre vie.
Pourtant le secret autour duquel tout tourne,
le but ultime, se résume en un souffle.
Partout, nous portons notre attention,
partout nous furetons, nous voyageons, nous explorons,
partout, sans cesse, jusqu’à notre dernier souffle.
Et c’est là pourtant que se trouve la réponse.
Ce souffle, à chaque instant, il entre, il sort,
il nous maintient en vie, mais nous n’y prêtons pas attention,
occupés que nous sommes à poursuivre notre ombre.
Prenons donc le temps, le temps d’être attentif à ce miracle qui,
à chaque seconde, est là présent dans notre vie, qui est notre vie même.
Cultiver le bonheur, de nombreux sages de par le monde,
nous ont lancé cette injonction.
Est-ce donc le bonheur qu’il faudrait cultiver ?
Non, il est toujours présent, à chaque instant,
il n’a pas besoin que nous le cultivions, il se suffit à lui-même,
c’est nous qui n’y sommes pas attentifs.
Dans chaque souffle, il se cache, mais nous tournons la tête
vers des ailleurs que l’on espère meilleurs,
quand il est là, en nous, il nous attend, avec quelle patience.
Quand allons-nous enfin ouvrir enfin les yeux,
quand allons-nous enfin prendre conscience,
quand allons-nous enfin nous rendre compte que toujours,
depuis le tout début, jusqu’à la toute fin,
le bonheur est là, en nous, attendant qu’on lui prête attention ?
Le secret autour duquel tout tourne,
le but ultime, se résume en un souffle.

Le dit d’Athanase, le sage de la montagne
Valéry Sauvage – août 2021